L'architecture joue un rôle crucial dans la création d'univers cinématographiques mémorables, transformant des simples décors en personnages à part entière.
Textes : Thibault Roy
Dans cet article, nous explorons comment trois villas emblématiques – la Hoke House, l’Elrod House et la Beverly House – transcendent leur fonction de simple décor pour devenir des éléments essentiels de la narration dans des films cultes. Chacune de ces maisons, avec son design distinctif et son intégration unique dans le paysage, enrichit l'expérience cinématographique en influençant l'atmosphère, le ton et la dynamique des histoires qu'elles accueillent.
HOKE HOUSE
Twilight, 2008
Située à Portland, dans l'Oregon, la Hoke House est devenue mondialement célèbre grâce à son rôle dans Twilight, où elle incarne la maison ultra-moderne de la famille Cullen. Conçue par Jeff Kovel de Skylab Architecture, cette villa de 500m2 allie modernité et respect de la nature, un thème central dans la saga. Sa structure en bois de cèdre, en béton et en acier, lui confère un aspect robuste tout en restant en harmonie avec la forêt environnante. Les immenses baies vitrées, qui occupent presque toute la façade, effacent la frontière entre l'intérieur et l'extérieur, offrant une vue imprenable sur les arbres et les montagnes de la région. Cela renforce l'idée que les Cullen, bien que des créatures surnaturelles, vivent en symbiose avec la nature. À l'intérieur, la maison est tout aussi impressionnante. Les espaces ouverts, aux lignes épurées et minimalistes, sont dominés par des couleurs neutres et des matériaux naturels, créant une atmosphère calme et apaisante. Le mobilier contemporain complète le tout, accentuant l’esthétique moderne et raffinée des lieux.
Chaque détail a été soigneusement pensé pour créer une atmosphère sereine, avec des meubles design tels que les fauteuils Eames et des luminaires modernes qui ajoutent une touche sophistiquée. Dans Twilight, la Hoke House symbolise le contraste entre l’apparence humaine civilisée des Cullen et leur véritable nature de vampires.
ELROD HOUSE
Les Diamants sont éternels, 1971
L'Elrod House, véritable icône du modernisme californien, est l'un des exemples les plus audacieux du génie architectural de John Lautner. Conçue en 1968, la villa incarne la fusion parfaite entre l'homme, la nature et la technologie, un principe central dans l'approche de Lautner, inspirée de son mentor, Frank Lloyd Wright. Située au sommet d'une colline rocheuse à Palm Springs, elle domine le paysage désertique avec une présence presque futuriste. Le toit en dôme, véritable prouesse d’ingénierie, est fait de béton brut et sculpté avec des découpes géométriques, qui laissent entrer des rayons de lumière naturelle, créant des effets d’ombre spectaculaires. Cet immense dôme n'est pas qu'une caractéristique visuelle, il donne une sensation de protection tout en préservant l'ouverture vers l'extérieur. L'utilisation de matériaux organiques, tels que la pierre brute et le bois, complète cette idée de maison ancrée dans son environnement, tandis que les vastes baies vitrées offrent des panoramas à couper le souffle sur les montagnes San Jacinto et le désert environnant.
L'intérieur de l'Elrod House est tout aussi impressionnant, avec une disposition circulaire centrée autour de la grande salle de séjour. Les meubles sont directement intégrés à la structure de la maison, une signature de Lautner, où l'architecture et le design d'intérieur sont inséparables. Chaque élément semble faire partie de l’architecture même de la villa, créant un espace fluide et continu. La piscine intérieure, qui semble se fondre avec le désert extérieur grâce à des portes en verre coulissantes, est l'une des pièces maîtresses de la maison. Elle représente cette fusion entre l’intérieur et l’extérieur, une philosophie centrale dans l'œuvre de Lautner.
Dans Les Diamants sont éternels (1971), cette architecture extraordinaire est mise en lumière de manière magistrale. La scène de combat mémorable entre James Bond et les acolytes de Blofeld exploite pleinement les vastes espaces ouverts et les formes organiques de la maison. Bond, interprété par Sean Connery, se bat à travers les différentes zones de la villa, utilisant les courbes et les angles de la maison comme points de cachette et d'embuscade. La piscine intérieure, avec son eau cristalline et ses lignes fluides, devient un élément clé de la chorégraphie de la scène, renforçant l'impression d'un environnement à la fois luxueux et dangereux. La manière dont la lumière naturelle traverse les ouvertures du dôme et se reflète sur les murs de béton, amplifie encore l'aspect spectaculaire et futuriste de la maison. Ce n’est pas seulement un décor, mais un acteur à part entière dans l’action, symbolisant le luxe et l’excentricité du monde de James Bond, alias 007.
L'Elrod House, avec ses volumes impressionnants, ses matériaux bruts et son intégration parfaite dans le paysage désertique, est un monument du modernisme organique. Son apparition dans *Les Diamants sont éternels* a renforcé son statut de légende architecturale, et elle continue d’inspirer les amateurs de design et d’architecture du monde entier. À la fois intemporelle et avant-gardiste, elle demeure un exemple saisissant de la vision unique de John Lautner et de l'impact indélébile du modernisme californien sur l'architecture mondiale.
BEVERLY HOUSE
Le Parrain, 1972
La Beverly House, située au cœur de Beverly Hills, est un véritable palais au style hispano-méditerranéen, bâti dans les années 1920 par l'architecte Gordon Kaufmann. Immortalisée dans Le Parrain (1972), elle est notamment le lieu où Michael Corleone se réfugie après la tentative d'assassinat de son père. D'une superficie de plus de 5000 m2, cette propriété grandiose s’étend sur plusieurs hectares et comprend une multitude de salons, salles de réception, et jardins luxuriants.
L'architecture de la villa reflète l'opulence de l'âge d'or d'Hollywood : des colonnes toscanes, des balcons en fer forgé, des arcades et des toits en tuiles rouges, typiques de l’architecture méditerranéenne. L’intérieur est orné de détails artisanaux, tels que des fresques murales, des boiseries sculptées, et des sols en marbre, contribuant à l’atmosphère fastueuse et théâtrale de la maison. Dans Le Parrain, la grande salle de réception, avec son plafond voûté et ses chandeliers imposants, sert de toile de fond à des scènes clés, ajoutant une dimension visuelle au pouvoir et à la richesse de la famille Corleone. La cour intérieure, avec ses fontaines et ses jardins impeccablement entretenus, incarne la grandeur et la décadence, faisant écho à la dynastie des Corleone. Plus qu’une simple villa, la Beverly House ajoute de la profondeur à l’intrigue, symbolisant à la fois le refuge et la prison dorée de la famille mafieuse.